Synthèse des échanges sur la thématique

La diversité des méthodes suivies pour traiter et interpréter les données a été approfondie dans cette quatrième session. Elle a permis d’ouvrir le champ des possibles en termes de pistes d’interprétation et de valorisation des données collectées.

Ainsi, différentes méthodes notamment de comparaison des résultats ont été discutées : (i) à partir de fermes de référence avec les exemples wallons et bretons, (ii) à partir d’une comparaison interannuelle de l’azote en jeu (quantité d’azote dans le sol et dans le couvert), ou encore (iii) en intercomparant les reliquats des agriculteurs suivis.

L’exemple wallon consiste à comparer les résultats d’APL issus des contrôles réglementaires à un référentiel d’APL, établi à partir de parcelles de référence échantillonnées à deux reprises (seconde quinzaine d’octobre et première quinzaine de décembre). L’analyse de la dynamique d’azote dans le sol entre ces deux dates, pour différentes classes de cultures, présente un intérêt pédagogique certain (ex : pente toujours décroissante derrière une céréale suivi d’un couvert, illustrant la capacité du couvert à absorber l’azote). Un autre atout de ces références est qu’elles permettent de prendre en compte les aléas climatiques annuels. La limite évoquée à cette méthode concerne l’écart qu’il peut y avoir pour certaines classes de cultures (la pomme de terre par exemple) entre l’évaluation agronomique des résultats (APL jugé satisfaisant par rapport au référentiel) et leur impact environnemental vis-à-vis de la qualité de l’eau (APL qui risque de générer de fortes pertes malgré tout).

La méthodologie suivie par les bretons pour construire le réseau de fermes de référence est similaire à celle des wallons. L’interprétation qui en est faite est néanmoins différente. Ces parcelles de référence vont permettre d’établir un REH attendu (notamment à partir des bonnes pratiques de fertilisation appliquées sur ces parcelles) et c’est l’écart entre le REH obtenu et le REH attendu qui fournira une note aux agriculteurs. L’objectif étant de mettre en évidence les agriculteurs qui ont systématiquement une mauvaise note, traduisant principalement des pratiques de surfertilisation. Même s’il est rappelé au cours des échanges qu’un REH élevé ne se traduit pas systématiquement par une surfertilisation (voire jamais sur certains territoires) et inversement, une surfertilisation peut être contrôlée par des couverts, laissant de faibles reliquats au début du drainage.

L’interprétation des données à partir d’un référentiel nécessite une quantité de parcelles suivies suffisantes pour établir des statistiques solides.

Une autre méthode d’interprétation des données, qui se prête au suivi long terme des parcelles de reliquats (plus de 6 ans) consiste à représenter la distribution annuelle du REH pour chaque culture de la rotation, sous forme de graphique radar. L’azote absorbé par le couvert est également représenté sur ce graphique, pour illustrer la notion d’azote en jeu au fil des cultures de la succession. L’objectif de REH est aussi représenté sur le graphique, pour rappeler la cible à atteindre et structurer les discussions avec les agriculteurs.

Une autre méthode consiste à comparer les résultats des agriculteurs entre eux, en relatif. Les objectifs de REH à atteindre sont souvent estimés à partir du modèle de Burns inversé. Certains des animateurs ne sont pas satisfaits par l’utilisation de Burns pour estimer le REH objectif, jugé trop imprécis. Néanmoins, les échanges ont mis en évidence que ce n’était pas grave si l’objectif fixé n’était pas précis pour les animateurs de collectifs d’agriculteurs, l’essentiel étant de leur donner un cap. Ces objectifs de REH sont mis à jour chaque année par un des animateurs, traitement apprécié des agriculteurs car permettant d’interpréter les résultats vis-à-vis du climat de l’année.

Des restitutions collectives des résultats des campagnes de reliquats sont organisées chaque année mais mobilisent souvent peu d’agriculteurs. Les discussions à l’issue de cette session le traduisent notamment par les objectifs trop nombreux et différents recherchés par les animateurs : sensibiliser les agriculteurs, en engager un maximum dans le suivi des reliquats, animer un groupe, les accompagner dans le changement de pratiques, suivre l’évolution de la qualité de l’eau, etc. (se traduisant par l’expression « qui trop embrasse, mal étreint »). Ces échanges ont débouché sur la nécessité de centrer les objectifs de traitement de données sur l’objectif que se fixe l’animateur avec le groupe d’agriculteurs suivis, pour ne pas s’égarer et orienter l’interprétation des résultats vers l’objectif visé.

Par ailleurs, des conditions climatiques défavorables (sécheresse notamment) et des contextes pédologiques parfois variés induisent régulièrement des observations sur des épaisseurs variables (0-90 cm, 0-60 cm et 0-30 cm). Cette éventuelle diversité de situation complique singulièrement l’interprétation et la comparaison des résultats.

Face aux difficultés rencontrées dans l’interprétation des données, souvent corrélées à des difficultés à mobiliser les agriculteurs autour des résultats présentés, les échanges ont permis de faire émerger quelques pistes pour les contourner. Dans un premier temps, il est conseillé d’associer les mesures de REH à des mesures de biomasse et d’azote absorbé par les couverts d’interculture pour interpréter l’azote en jeu au début du drainage. Par ailleurs, il est conseillé de se concentrer sur l’interprétation des ordres de grandeurs obtenus et non pas sur les valeurs précises ; l’essentiel étant in fine de motiver les agriculteurs suivis à améliorer leurs pratiques pour réduire leur impact sur la qualité de l’eau, pas de chercher le résultat à la virgule près (surtout compte-tenu de l’incertitude associée). L’importance de communiquer sur l’objectif à atteindre est également soulignée, cet objectif permet de fournir un fil conducteur aux agriculteurs et les motive à s’investir. L’importance de la communication autour du délai de transfert avant d’observer un résultat à la nappe, ou sur l’impact de la lame drainante sur les concentrations en nitrate, est également soulignée, notamment auprès des acteurs qui gravitent autour des agriculteurs et de l’animateur. Il émerge également de ces discussions que ce sont les suivis de parcelles depuis plusieurs années et la relation de confiance qui se tisse entre agriculteurs et animateurs qui permettent une bonne interprétation des données.

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Retours d’expérience autour du REH/RDD/APL Droit d'auteur © par Christophe Vandenberghe et Marion Delesalle est sous licence Licence Creative Commons Attribution 4.0 International, sauf indication contraire.

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